Intervention de Frey
Cette intervention complexe du pancréas s’adresse à des malades atteints de pancréatite chronique. Cette maladie, dont la principale cause est l’alcool, est à l’origine d’une destruction progressive du pancréas qui devient fibreux avec des calcifications entrainant obstruction et dilatation des canaux pancréatiques. Les conséquences possibles sont des poussées de pancréatite aiguë, une douleur abdominale chronique aggravée par l’alimentation avec amaigrissement et parfois une cholestase (rétention biliaire) lorsque le cholédoque est comprimé au niveau de la tête du pancréas. L’opération s’adresse à des malades sevrés de toute consommation d’alcool dont la douleur n’est pas soulagée par les médicaments, à faible risque opératoire. Les malades à risque relève prioritairement d’un traitement endoscopique.
Principe
Cette opération est faite par voie ouverte (laparotomie médiane au dessus de l’ombilic ou bi-sous-costale). Le chirurgien réalise une décompression du canal pancréatique principal (Wirsung) en ouvrant le pancréas sur toute sa longueur et en évidant la tête du pancréas. Les sécrétions pancréatiques sont dérivées en suturant l’intestin grêle sur le pancréas ouvert (anastomose pancréato-jéjunale). Ce geste peut être complété par une dérivation de la bile sur la même anse intestinale en cas de compression biliaire associée. Dans ce cas, l’ablation de la vésicule biliaire est faite systématiquement. L’intervention dure de 4 à 6 heures.
Suivi post-opératoire
A son réveil, le patient est « techniqué » avec une sonde vésicale, une perfusion veineuse pour hydratation et alimentation artificielle éventuelle et un drain abdominal sortant par le flanc droit. La surveillance précoce ne nécessite habituellement pas de séjour en réanimation. Dans le service, le patient reçoit un traitement antalgique adapté à sa douleur. Le premier jour, il est autorisé à boire et un premier lever est réalisé. L’alimentation est réintroduite progressivement dans les jours qui suivent en fonction de la reprise de transit. La sonde vésicale est enlevée le 1er ou le deuxième jour, la perfusion lorsque le patient peut s’alimenter suffisamment et la lame de drainage à partir du 5ème jour . Une alimentation artificielle par voie veineuse ou sur sonde naso-gastrique peut être requise, notamment en cas de dénutrition préopératoire. Une prise en charge par le kinésithérapeute ou la diététicienne est parfois demandée. La surveillance est clinique et biologique. Les prises de sang permettent en particulier de contrôler l’hémoglobine à la recherche d’un saignement et la levée de la compression biliaire si une dérivation biliaire a été faite. Un dosage d’enzyme pancréatique est également demandé sur le liquide du drain pour rechercher une fuite de la suture pancréato-jéjunale (fistule). La durée d’hospitalisation est de 7 à 10 jours.
Bénéfices de l’opération
On observe une disparition durable de la douleur chez 90% des patients associée à une reprise de poids (-5-6kg en moyenne) permettant à la grande majorité des patients de reprendre « une vie normale ». La résection limitée permet de mieux préserver la fonction du pancréas (contrôle de la glycémie et sécrétion d’enzymes pour la digestion), contrairement aux opérations de pancréatectomies classiques. Ainsi, l’apparition d’un diabète est rare dans les années qui suivent (10-15%) et liée à l’évolution de la pancréatite chronique que l’opération de Frey ne guérit pas.
Complications
Le taux de complications est de l’ordre de 10% lié principalement aux complications respiratoires (5-10%) et hémorragiques (5-10%). La « tranche » du pancréas peut se mettre à saigner et entrainer une hémorragie digestive (sang dans les selles). La fistule pancréatique est plus rare (2%) et nécessite de laisser en place le drain jusqu’à cicatrisation.